« Avez-vous écouté...»

Mina laissait son regard dériver sur la scène, encore un peu dans le vague. La brume qui flottait dans son esprit ne semblait pas se décider à s’en aller, aussi était-elle encore un peu perdue. Cette ville, cette école, elle n’arrivait pas à se souvenir de la raison de sa présence ici. Elle s’était retrouvée là, dans un couloir et… Et elle ne savait pas. Cela faisait une petite semaine déjà qu’elle rôdait dans les parages, s’intéressant à cet univers nouveau pour elle, et en nouant quelques liens ici et là. Tout le monde semblait l’accueillir à bras ouverts… Surtout les garçons en fait. Mais qui ne craquerait pas sur cette jolie blonde venue d’on ne sait où encore seule ? La salle où elle se trouvait était déjà bien remplie lorsque l’intervenante arriva. Une jeune femme aux cheveux flamboyants qui dégageaient une aura toute particulière. Une aura qui tira un frisson incontrôlé à la blonde. Qui était-elle ? Pourquoi lui faisait-elle cet effet ? Mina plissa les yeux, détaillant un peu plus cette inconnue. Non, elle ne lui disait finalement rien. Mais après tout, sa mémoire n’était-elle pas défaillante ? Peut-être qu’elles s’étaient déjà rencontrés ? Oui, sa devait être ça. Son exposé se passa assez rapidement. Le sujet ? Les dangers des rapports non-protégés. Pour une foule d’adolescents bourrés d’hormones, la Valkyrie doutait fortement de l’impact du discours sur son auditoire.  Mais après tout, pourquoi pas ? A la fin, la rousse déclara : « Si vous avez d'autres questions d'ordre plus privé, vous pouvez venir me voir maintenant. Je serais dans la salle pendant encore une heure ! » dit-elle en souriant. Les élèves se levèrent alors tous de concert, comme s’ils n’attendaient que ça avant de se diriger vers la sortie. Mina quant à elle était restée à sa place, incertaine. Soupirant, elle se décida. Elle devait savoir. Peut-être que cette fille pourrait l’aider ? L’aider à retrouver ce pan de mémoire qui lui manquait ? La reconnaitrait-elle ? Autant de questions encore sans réponses. Sans compter cette impression qu’elle avait éprouvée dès qu’elle avait posé ses yeux sur elle. Heureusement les collégiens désireux de s’entretenir avec l’intervenant n’étaient pas nombreux. En réalité il n’y en avait pas. Elle pénétra dans la petite salle. La rousse la gratifia d’un sourire avenant en la saluant : « Salut ! Quel est ton nom et en quoi puis-je t'aider ? » Déception. Finalement elle ne la connaissait pas. Mina faillit faire demi-tour mais s’arrêta finalement dans son geste. Cette envie d’en apprendre plus sur elle et de l’effet qu’elle lui procurait restait à approfondir. Elle rendit son sourire à son interlocutrice avant de dire : « Je m’appelles Mina Freyja ». Ça au moins s’était sûr. Comment ? Car elle avait retrouvé dans son sac ses papiers ainsi que l’adresse de son logement. La blonde, tout en s’assaillant, dévisageait cette jeune femme avec curiosité. Le sentiment étrange se faisait plus fort encore à son approche. Elle étira ses lèvres et dit finalement : « En fait… ». Gagner du temps, tenter d’analyser son ressentit. Mina sentait que quelque chose se passait en elle. Qu’une partie de son véritable moi était à deux doigts de s’extérioriser. « Je pensais que vous pourriez m’aider… ». Trouver un prétexte, n’importe quoi. Elle le tenait, elle le sentait ! « J’ai l’impression de vous connaître ». Elle ricana, nerveuse. « Je sais c’est idiot mais dès que je vous ai vu… J’ai eu envie de… ». Envie de quoi ? Bonne question. Son frisson de tout à l’heure était-il lié à la peur ? Non. La colère ? Non. Le désir ? Peut-être. L’excitation ? Sûrement. Mais pas une excitation normale… Plus une joie malsaine, qui ne demandait qu’à s’exprimer. « Envie de… », Répéta-t-elle en fronçant les sourcils. De l’attaquer ! Cette impression l’assaillit en une fraction de seconde avant de disparaître tout aussitôt. « De vous parler », lâcha-t-elle finalement sur un ton peu convaincant. « Vous... Enfin je ne vous dit rien? J'ai le sentiment que... Qu'on a une sorte de lien ». A coup sûr qu'elle devait la prendre pour une dingue ! Tans pis, se dit-elle. Les choses étaient dites.